mardi 18 décembre 2012

« Pelléas et Mélisande » de Maurice Maeterlinck, par Doriana Turco


L'auteur

Maurice Maeterlinck est né en 1862 à Gand. Il faisait partie de la bourgeoisie flamande, il parlait donc français couramment. C’était un catholique qui s'intéressait au mysticisme. Il a entamé des études de droit en suivant Verhaeren qui a sept ans de plus que lui et avec qui il va créer un groupe de littérature : « La jeune Belgique ». Le symbolisme français le marqua énormément. Lors d'un voyage à Paris, il rencontre le prince du symbolisme (Mallarmé) qui l'influencera. Le romantisme allemand est aussi très important dans ses œuvres. La princesse Maleine connaît un grand succès à Paris en 1890, dès lors il devient un auteur célèbre. En 1911, il sera le seul auteur belge à recevoir le prix Nobel de la littérature.
Il a écrit Pelléas et Mélisande en 1892. En 1902, Claude Debussy tire de cette pièce un opéra.

Les noms des personnages.

Les noms des personnages n'ont pas été choisis par hasard et ils ont tous une histoire ou une étymologie différente. Geneviève et Golaud viennent sans doute d'un conte, celui de Geneviève de Brabant. « Geneviève a épousé un prince, nommé Siffroi, qui partit à la guerre. Elle est enceinte et ne le lui dit pas ; entre temps, Golo, l'intendant du prince, essaie de séduire Geneviève mais n'y parvient pas. Jaloux, il écrit à Siffroi que Geneviève a eu une aventure et qu'elle attend un enfant de cet adultère. Siffroi est très en colère et veut tuer Geneviève et le nouveau-né en les envoyant dans la forêt avec des chasseurs qui devront les tuer. Mais les chasseurs les laisseront en vie. Une biche s'occupera d'eux jusqu'au jour où Siffroi retrouve Geneviève et son enfant. Elle raconte la vérité à Siffroi qui la croira et se vengera. »
Arkel prend son nom du mot « ark » qui signifie vieux et roi à la fois. Nous remarquons aussi que la syllabe « el », qui est une syllabe liquide, revient dans Pelléas et Mélisande. Nous avons l'impression que ces personnages sont faits pour s'entendre.
Mélisande a les syllabes « mél » comme mélodie donc le chant, « méli » pour miel et « sande » pour le sable. Tous ces éléments soulignent surtout sa blondeur, le sable peut aussi signifier le temps qui s'écoule. Le miel a un côté positif et négatif, il est doux mais il peut être trop sucré et écœurant. C'est une opposition comme il y en a beaucoup dans la pièce.
Yniold a le « ol » et le « d » de Golaud. Cela montre un lien entre eux.
Allemonde veut sûrement dire « tout le monde » avec le « alle » du début. Donc nous pouvons penser que cette histoire peut arriver à tout le monde.

Les thèmes

Il y plusieurs thèmes présents dans ce spectacle, le plus important est l’opposition de l'amour avec la mort. L'amour n'a pas l'air de fonctionner quand il est associé au mariage. Le premier et le deuxième mariage de Mélisande finissent mal tous les deux. L'amour est possible mais seulement dans le malheur et la mort. La mort est là en permanence, c'est l'intruse cachée derrière la porte mais qui se dévoile dans les odeurs, dans les lieux sombres,...
Il y a aussi le thème de la destinée. Mélisande est écrasée par le destin. Au début, elle a réussi à le fuir mais pas la deuxième fois. A la fin, nous savons que sa fille aura la même destinée. La porte a un lien avec ce thème car elle veut empêcher sa destinée de se produire. Elle a du mal à s'ouvrir et pourtant elle donne l'impression qu'elle est simple à fermer. Il y a aussi le fait que la robe de Mélisande s'accroche à la porte un bon moment avant qu'elle puisse rejoindre Pelléas.


Les symboles.

Comme je l'ai dit précédemment, Maeterlinck était inspiré par le symbolisme. Voici ceux qui sont exprimés dans la pièce :

Le symbole de l'eau : Allemonde est entouré par la mer, Mélisande et Golaud se rencontre près d'un point d'eau, l'anneau tombe dans une fontaine, Pelléas et Mélisande pleurent,... L'eau est le symbole de la vie (fontaine des aveugles, eau claire) et aussi celui de la mort (l'eau des souterrains, sombre).

Le symbole du cercle : C'est l'idée du cycle, au début, le soleil se lève, les servantes sont à la porte et veulent l'ouvrir, Golaud chasse dans la forêt. A la fin, le soleil se couche, les servantes sont entrées et ont ouvert la porte, Golaud a tué son frère et a « chassé » sa femme dans la forêt. Il y a aussi ce qui est en forme de cercle comme la couronne, la bague et la balle de Yniold.

Le symbole de l'or : L'or disparaît, coule, il est idéal et d'une valeur absolue, il se noie. Il est donc toujours difficile à atteindre. C'est la difficulté d'accéder à l'idéal. A un moment donné Yniold veut prendre sa balle en or mais il n'y arrive pas car elle est en dessous de pierres trop lourdes.

Le symbole de la clarté : Nous avons pu remarquer que les lieux étaient souvent sombres. Les personnages ont du mal à voir et cherchent sans cesse la lumière. Cette lumière représente la vérité et l'ombre, ce que nous ne savons pas.

Il y a aussi les cheveux de Mélisande qui sont or et eau à la fois. Pelléas les confond avec la lumière et l'or ensuite il se laisse inonder par cette chevelure, elle tombe sur lui comme de l’eau. C'est le lien qui se crée entre Pelléas et Mélisande.

lundi 3 décembre 2012

Si tu passes la rivière (par Doriana Turco)


Si tu passes la rivière de Geneviève Damas

L'action

Si tu passes la rivière, François, gare à toi ! Voilà comment débute l'histoire, celle de François Sorrente, un jeune garçon de dix-sept ans s'occupant des cochons de la ferme de son père tyrannique. Il nous raconte la période de sa vie dans laquelle il se pose énormément de questions sur la rivière que Maryse, sa sœur, a traversée pour ne jamais en revenir et puis aussi, il se demande qui est sa mère. Ces questions, il devra y répondre par lui-même car ce n'est pas son père ni ses frères qui l'aideront. C'est grâce, entre autres, au curé Roger et surtout grâce à l'apprentissage de la lecture qu'il va lui enseigner que François va évoluer, grandir, trouver des réponses et surtout pouvoir trouver les mots. Car avant, il n'avait pas beaucoup de vocabulaire, lorsque sa sœur adorée est partie et qu'on a tué son ami Oscar devant lui, il ne savait pas quoi dire car rien ne sortait mais maintenant les mots sont ses amis et ils sortent tout seuls. Maintenant il peut lire et découvrir, il peut se faire des amis qui l'aideront, avec chacun leur caractère attachant. Il pourra sans aucun doute trouver les réponses parfois très surprenantes...

Le message

La lecture, c'est ce qui va permettre à notre héros de mûrir au fil des lignes et de savoir enfin qui il est vraiment. Car sans cette compétence, que nous comprenons essentielle à la vie, François serait resté un « fada ». Lui-même a compris qu'il devait l'apprendre pour pouvoir résoudre ces problèmes. Nous constatons dans le livre que savoir lire et s'enrichir en vocabulaire nous permet beaucoup de choses. Par exemple, après avoir appris quelques nouveaux mots dans les lectures de Roger et appris les consonnes et les voyelles, François se fait de nouveaux amis, les mots lui viennent d'eux-mêmes, il est heureux et ouvert, le silence ne lui fait plus peur car il sait qu'il peut le briser. Il change complètement sans s'en rendre compte tout de suite mais plus tard il devine qu'il est quelqu'un d'autre.

Mon avis:

Dès la première page, nous sommes confrontés à l'interdiction du père envers François. Nous plongeons immédiatement dans le bain du récit. Nous voyons le père strict et la vie dure de la ferme et pourtant, à notre petit François, tout ça ne lui fait pas peur. C'est pour ça que je me suis vite attachée à lui et en plus lui, il a du vent dans la caboche comme il le dit lui-même. C'est un garçon que je veux suivre et aider. Je l'ai même pris pour ami.
La lecture de cet ouvrage est tellement simple que nous pourrions le dévorer d'une seule traite. L'usage du langage familier rend le livre agréable à lire car c'est facile à comprendre, il ne faut pas se creuser la tête et s'arrêter en pleine action pour saisir l'auteur.
Les personnages secondaires ne sont pas nombreux et ça aussi c'est un point fort. Geneviève Damas leur a donné à chacun une personnalité différente qui nous donne aussi l'envie de les connaître.
Parlons aussi des descriptions si légères mais tellement axées sur des petits détails. Je ne m'en suis pas plainte puisque premièrement c'est François qui les exprimait par ce qu'il voyait évidemment mais aussi et surtout par les odeurs et les goûts. Il utilisait tous ses sens. C'était plutôt inattendu pour moi. Deuxièmement, elles ne prennent pas une place importante dans ce roman.
Et, cerise sur le gâteau, la fin est juste très ingénieuse selon moi, vu qu'après avoir lu le livre et encore maintenant je pense à François et je me demande ce qu'il a trouvé de l'autre côté, s'il va bien etc. Comme Geneviève Damas l'a dit, l'imaginaire peut être aussi réel qu'on le souhaite quand nous y pensons et que nous lui donnons de la valeur.                                                                                                                                                                                                                      

vendredi 30 novembre 2012

Le voyage de Luca (par Chiara Schifano)


Le voyage de Luca est un roman de Jean-Luc Outers, publié en 2008 par les éditions Actes Sud.

L’histoire 

Quand Marian et Julie apprirent la bonne nouvelle, l’arrivée d’un bébé, ils eurent une idée folle : quitter la Belgique ou plus précisément Bruxelles pour faire le tour de l’Amérique.
Quelques mois après la naissance du petit Luca, ils décidèrent de commencer l’aventure.
Ils commencèrent par New York où Jessica et Ralph, amis de leurs amis belges Marc et Lucie, leur prêtèrent gentiment leur appartement.
Arrivé à New York, Marian décida de racheter à un vieux monsieur sa camionnette pour partir vers de nouveaux horizons.
Ils quittèrent New York pour le reste de l’Amérique, et le voyage commença vraiment.
Après New York, ce furent d’autres lieux, comme le Texas où ils adoptèrent Yesterday, une chienne abandonnée, ou bien le Mexique où ils rencontrèrent Alberto et Victoria, cultivateurs de café, qui les hébergèrent quelques jours, ou encore Mexico où Julie apprit qu’elle était de nouveau enceinte, Tuxtepec où ils rencontrèrent Augusto un mécanicien qui les aida lors d’un caprice de la camionnette, Oaxaca qui leur plaisait particulièrement, Acapulco, le Colorado, Las Vegas où Luca vit pour la première fois un cirque, Los Angeles, San Francisco où ils firent la rencontre d’une famille, voisine de leur amis Nadine et Georges, les Drumon qui ne les appréciaient pas, Victoria, Vancouver où une terrible nouvelle les frappa, la fausse couche de Julie, Montréal où ils restèrent avec Gérard et Pauline, amis des parents de Marian et où l’aventure prit fin.
Lors de ce tour de l’Amérique il y eut beaucoup de rencontres, des bonnes et mauvaises nouvelles ainsi que des séparations mais ce fut un voyage d’apprentissage pour Luca qui, à chaque nouveau lieu, rencontra des choses nouvelles comme les animaux, les moyens de transport, le cirque, les langues, la mer, les océans, la nage, la marche, les étoiles, les surfeurs et bien d’autres.
Quelques années plus tard, Luca fut frappé d’un mal qui ne lui donna plus goût à la vie mais après l’aide de la thérapeute familiale l’histoire va se répéter.

Mon avis 

Ce fut un livre agréable à lire, car l’histoire est originale et fait rêver malgré les petites mésaventures.
Ce qui est assez plaisant, c’est que l’histoire est racontée par Marian à la thérapeute familiale, ce qui donne l’impression de deux histoires parallèles.
Les personnages sont attachants et on peut s’identifier à eux, ils ont des problèmes, des disputes, comme tout le monde ; ils ne sont pas très spéciaux mais font quelque chose d’original, le tour de l’Amérique. Ça nous montre que même sans être quelqu’un de particulier, on peut faire des choses folles.
Ce qui m’a plu surtout, c’est le cadre de l’histoire, le fait que ça se passe en Amérique, en Belgique et en 1980.
La fin est surprenante : on ne s’attend pas à ce que Luca refasse un tour de l’Amérique et surtout pas que Marian et Julie recommencent avec le petit Jack comme avec Luca.
L’écriture est accessible à tous, ce qui permet aux lecteurs de n’importe quel âge de lire le livre qui est particulièrement intéressant.

L’interview de l’auteur 

Après avoir lu ce livre de Jean Luc Outers, Le Voyage De Luca, j’ai eu envie de lui poser quelques questions à propos de son livre mais aussi sur le métier d’écrivain pour pouvoir en savoir beaucoup plus sur le domaine de l’écriture.
Voici mes questions ainsi que ses réponses. 

Q1. Qu’est-ce qui vous a donné l’envie de devenir écrivain ?
R. : J’ai toujours écrit depuis l’adolescence, des notes, poèmes, petits textes. Écrire, ça ne s’apprend pas. Et puis un jour ce que j’étais en train d’écrire s’est prolongé et j’ai eu envie de continuer, c’est devenu, presque par surprise, L’ordre du jour, mon premier roman. Il faut dire que l’idée d’écrire un livre me trottait dans la tête, j’avais le sentiment qu’il fallait que j’en écrive un pour exister par rapport à mon père qui écrivait lui aussi et était un grand manipulateur de la langue française.

Q2. Dans ce roman, l’histoire se passe principalement en Amérique. Avez-vous déjà visité cet immense pays ?
R : Ce voyage en Amérique, nous l’avons réellement fait en 1981 mais avec deux enfants (un et cinq ans). Comme je voulais écrire un roman sur la paternité, je n’en ai gardé qu’un (d’enfant) pour le roman. Pour le reste, je n’ai à peu près rien inventé. C’était une autre époque et nous étions inconscients.

Q3. D’après vous, quelles sont les principales difficultés pour écrire un roman ? Grâce à quelles qualités peut-on les surmonter ?
R : Pour écrire un roman, le plus dur, c’est la distance. Comme j’écris sans plan, sans idée même de ce que je vais raconter, il faut donc que je m’accroche pour arriver au bout, un peu comme lorsqu’on traverse un désert. On finit toujours par arriver de l’autre côté mais il faut un peu de discipline dans le travail. Personnellement je m’isole comme je le fais maintenant où j’écris à Bordeaux. Pour vous éclairer, je vous envoie un petit texte écrit à la demande de La Libre sur le thème : écrire aujourd’hui.

Voici ce texte aimablement offert par Jean-Luc Outers :

Être écrivain aujourd’hui, c’est ouvrir sa fenêtre et écouter les bruits de la rue, le souffle du vent, le sifflement du train et le hululement de la chouette, c’est saisir une conversation dans un tram et y voir le commencement d’une histoire, c’est croire à la magie des mots pour dire le bruit de la neige sous les pas, c’est regarder la mer et donner un nom à ses couleurs changeantes, c’est marcher sur un trottoir, puis s’arrêter bouleversé par une fleur de ballast, c’est s’émouvoir à la vue d’un bébé mimant la langue sur les lèvres de sa mère ou d’un vieillard aphasique ouvrant la bouche pour rabâcher une histoire ancienne, c’est laisser affleurer à la mémoire ce que l’on pensait oublié, c’est faire entendre l’origine, c’est, dès le réveil, respirer à travers chaque mot qui surgit, c’est nommer les choses et, ce faisant, se relier au monde, c’est trouver le bonheur dans une simple notation sur un carnet sorti de sa poche, c’est ouvrir le dictionnaire et aller à la cueillette puis, en le refermant, inventer un mot qui peut-être s’y trouvera un jour, et le taquiner en l’envoyant à la fin de la phrase voir si on y est, c’est transformer par le langage le réel en imaginaire, les humains en personnages, les bureaux en labyrinthes, les habitations en maisons hantées, c’est faire parler les morts, les animaux et les pierres, c’est, comme les enfants, se raconter des histoires avant même de savoir ce que peut bien être une histoire, c’est chercher l’éclaircie dans l’obscurité, c’est ériger les mots contre la brutalité du monde et les envoyer en pleine poire des tyrans et des ploucs, qui, de toute façon, ne les liront pas, faute de temps, se désoleront-ils, rivés à leur poste de télévision, c’est être terrifié par l’innommable, c’est s’éloigner, prendre du recul, s’échouer loin de soi, s’immerger dans la solitude du silence et dire ce que le langage oral ne peut pas dire, c’est ne rien savoir de ce qu’on va écrire et se laisser porter par les mots comme on se laisse soulever par le vent, c’est, comme dit le philosophe, se croire arrivé au port et se trouver rejeté en pleine mer, c’est découvrir quelque chose qui n’était pas là avant et s’éblouir de l’à peine écrit sous l’encre qui sèche, c’est se faire à l’idée que cette partie de soi qui écrit est peut-être un autre, bref, c’est être deux, une fois pour toutes, l’écrivain et le premier lecteur, ébahi qu’il se soit trouvé quelqu’un pour écrire ça, ou enfin, comme dit l’ami Pirotte, « sonner à sa propre porte avec l’idée que quelqu’un va nous ouvrir ».


samedi 27 octobre 2012

"Stupeur et tremblements" d’Amélie Nothomb


Un reportage de Mélanie Lonobile (6e sc.)

L’intrigue
Dans les années 90, une jeune Européenne est embauchée dans une entreprise du Japon, où la rigueur et le courage tiennent beaucoup de place. Sa supérieure, Mademoiselle Fubuki Mori, est exigeante et n’accepte pas la moindre erreur de la part de celle-ci. Maladroite, elle va vite se faire remplacer dans chaque tâche à laquelle on l’a affectée : recopier des chiffres très longs, récurer les toilettes, en passant par le service café et les photocopies bien alignées, notre héroïne n’a qu’à bien se tenir.
Le fait qu’elle collabore avec Monsieur Tenshi sur un projet qui ne lui est pas destiné n’arrange en rien sa relation avec Mori qui semblait au début gentille comme un agneau. La Belge est bien loin du compte, Fubuki, une vraie peau de vache, n’hésite pas à la dénoncer à son supérieur Monsieur Saito pour le travail sur le beurre allégé qui devait être effectué par un autre employé. Après sept mois dans l’entreprise, elle décide de quitter la firme, le cœur serré malgré tout. Elle considère en effet son expérience dans l’entreprise nippone comme un passage de sa vie qu’elle ne regrette pas.
En 1991, le premier livre d’Amélie Nothomb est publié. En 1993 elle reçoit une lettre de félicitations de Fubuki, celle qui lui a fait vivre un cauchemar. C’est en fait une femme concentrée sur son travail, dans la tradition de la culture japonaise qui exige beaucoup de bonne conduite et d’honneur. Amélie n’a aucun doute sur ce que pense réellement Mori d’elle, elle est simplement heureuse, de plus le mot est écrit en japonais, la narratrice est comblée. Elle décide de raconter les sept mois passés là-bas et c’est en 1999 que paraît Stupeur et tremblements.
Mon avis
Dès les premières lignes, nous savons à quoi nous attendre, humour de l’auteur en toutes circonstances, style d’écriture facile à digérer, bref un bon petit livre. Il faut bien le dire, ce livre de plus ou moins 186 pages m’a bien fait rigoler, l’humour un peu décalé et les remarques de l’auteur font oublier le milieu dans lequel évolue l’héroïne Amélie-San. Cette petite biographie romancée sur un moment vécu par l’auteur rend l’ouvrage réaliste et plaisant à lire. La description de l’ambiance du travail au Japon instruit le lecteur, ainsi on peut en savoir un peu plus sur les mœurs japonaises, la difficulté que se donnent les Nippons pour toujours être à la hauteur, la pression qu’ils s’imposent au travail pour exceller parce que rater au Japon est impossible, mal vu, indigne. Au pays du Soleil levant, le taux de suicide est supérieur à la moyenne des autres pays, nous Européens n’avons pas le même train de vie qu’un Japonais moyen.
Le lecteur éprouve de la compassion pour cette jeune héroïne confrontée du jour au lendemain à la dure réalité du travail au Japon. La manière de vivre là-bas et en Belgique est complètement différente, ce livre est un vrai choc culturel, une leçon de vie. Elle nous interroge sur la situation vécue par les employés nippons, n’est ce pas exagéré ? On en apprend beaucoup sur cette culture que l’on croyait moderne. La puissance de ce pays ne s’est pas faite toute seule, en voilà une petite bouchée, un fragment dans une immense usine à business où le temps c’est de l’argent, tout doit être fait vite et bien, aucune erreur n’est possible. Tel un robot, l’employé doit savoir accomplir toute les tâches imposées par son supérieur.
Ce roman nous renvoie sur un Japon du vingtième siècle, plein d’idées encore antiques, où la dépendance au travail est presque obligatoire. L’honneur est important aux yeux des habitants de l’île aux nouvelles technologies. Un roman rempli d’audace et de vérité, bref j’adore !
Une lettre d’Amélie  !

Après la lecture, j’ai écrit à Amélie Nothomb. Je lui ai d’abord expliqué mon admiration et le fait que j’avais bien aimé son livre. J’ai eu la chance de recevoir une réponse ! Amélie m’a répondu très vite et sa lettre m’a fait plaisir.
Je lui avais posé quatre questions. Voici ses réponses :
  • D’où est venue l’idée de devenir écrivain ?
  • C’est mon obsession depuis toujours. L’écriture est ma façon de créer de la musique, et j’aime la musique plus que tout.
  • Quel est le message important que vous avez voulu passer dans cet ouvrage?
  • Il y en a plus d’un. Le plus important : admirez les Japonais! Ils vivent tous cette épreuve et ils tiennent le coup.
  • Vous attendiez-vous à cette rigueur de la part des Japonais?
  • Je m’attendais à quelque chose de terrible mais pas à ce point.
  • Comment expliquez-vous ce pincement au cœur quand vous quittez l’usine?
  • Il y avait des gens que j’appréciais dans cette entreprise. Et j’y avais vécu quelque chose de fort.






lundi 22 octobre 2012

Colette Nys-Mazure dans notre classe

Nous avons reçu aujourd'hui Colette Nys-Mazure à propos de son livre Célébration de la lecture.
Voici, en six clips vidéo, ce qu'elle nous a dit d'elle, de l'art, de son écriture.



jeudi 18 octobre 2012

Célébration de la lecture (III)


À la fin de son livre, Colette Nys-Mazure écrit : « Je cherche comment restituer la merveille, la susciter, convier mon lecteur à en faire autant. »

Nous avons donc, nous aussi, tenté d’explorer les rapports entre peinture, lecture, écriture. Voici quelques-uns de nos essais :


Tout est extrêmement calme. Atmosphère et mer immobiles. Le soleil levant à l’horizon illumine le visage paisible de la lectrice allongée. Chaude intimité entre la mer et la jeune liseuse. Seule à seul avec le paysage, je ne veux pas les déranger. Le ciel est dégagé, rien ne vient les perturber. Ce lieu n’ose pas ennuyer sa lecture comme elle ose à peine toucher l’eau pour la troubler.
Un lien profond entre elle et mer le temps d’une lecture, je contemple leur tranquillité. 
Doriana

     

Dans cet intérieur hollandais, le temps semble s’être arrêté. La servante a rendu le carrelage brillant tout comme le linge éclatant. Fatiguée de sa tâche, elle s’est posée. Le valet à ses côtés est à présent disposé à lui transmettre la lettre.
Entre ombre et lumière, le doute prospère,
Anthony

               
        




La jeune fille est sans doute soumise à une lecture déplaisante. Yeux exorbités, bouche bée, elle est vêtue d’une blouse lilas, dans un arrière plan mauve qui fait ressortir les expressions de son visage. Nous comprenons qu’elle aurait préféré ne pas avoir lu ce passage et rester dans l’ignorance.
À moins que, précisément, elle fasse ses délices de la charmante terreur que lui procure cette effrayante lecture ?
Kevin






Elle est nue et plongée dans sa lecture, elle me laisse croire qu’elle est libre. Elle est allongée sur une brume rousse et noire. La couleur de ses cheveux roux ressort dans la partie de brume noire et la partie moyenne de son corps se détache dans la partie de brume rousse. Sa petite main qui soutient  sa tête me laisse croire qu’elle est détendue, tranquille. Pourquoi est-elle nue ? Est-ce dû à la couleur rousse qui inspire la chaleur ?
Mathieu

             

Elle est seule sur sa chaise, tranquille et passionnée.
Elle est belle et jeune.
Malgré les couleurs sombres qui l’entourent, elle sort du noir avec sa robe blanche à volants, peut-être de mariée, et elle lit, elle lit son petit livre blanc et discret, d’une main soutenant sa tête.
Près d’elle, sur un guéridon, un bouquet de fleurs, des pelotes de laine.
Peut-être aime-t-elle s’évader, quitter sa solitude ?
Le bouquet et la robe laissent croire qu’elle apprécie  le romantisme.
Peut-être rêve-t-elle d’une belle histoire d’amour ?
Chiara



Elle est vêtue de sa robe ample et blanche, comme une rose à l’envers qui éclaire son visage si pâle.
Tenant un livre avec douceur d’une main, tandis que sur l’autre elle pose sa tête, elle est assise dans ce fauteuil rouge que l’on perçoit de derrière, sortant de l’ombre.
Si pensive et posée.
Lit-elle le livre dans le calme et la sérénité ou est-elle passionnée par l’histoire et rêve-t-elle de la vivre ?
Madison



Napoléon lisant après une bataille. Il est en tenue soignée, les cheveux bien coiffés. Il a l’air posé, concentré, prêt à travailler. Installé dans un fauteuil de cuir, il s’arme de son crayon taillé et pointu comme une baïonnette. Il lit et complète un rapport. Autour de lui, reposent en paix des dizaines d’ouvrages reliés d’or. Derrière, sur un bureau en chêne massif, un secrétaire discret rédige et lit à son tour, éclairé par une simple lampe capuchonnée de toile bleue, couleur de la France. Tout cela tamisé par une couleur ocre, sépia.
Napoléon, la guerre est un art, la concentration est de mise.
Pryssillia 





Dans cette pièce sombre et colorée, une jeune bourgeoise lit, le petit doigt tendu.
Elle s’appuie à un coussin posé dans le fond de son fauteuil.
Concentrée sur sa lecture, vêtue de jaune telle une abeille sans rayures, elle butine le livre.
Ses cheveux bruns sont attachés grâce à une pince, ils ont l’air longs.
Cela fait des heures que tu lis, attends-tu ton mari parti à la chasse ?
Tu n’as pas l’air troublée par ta solitude, tellement tu es plongée dans ta lecture. Ne détourne pas ton regard sur moi, je ne fais que te décrire.
Jérémy







La voie vers la sagesse

Il ne se doute pas que du haut de cette colline, je l’observe. Cela fait un petit temps que je regarde son visage figé sur ce cahier. Mais que lit-il ? Qu’étudie-t-il ? Sa solitude permet-elle à son esprit concentration et réflexion ? Assis à même le sol, il recherche la sérénité. N’a t-il pas envie d’aller rejoindre sa fraternité ?

Éclaircit-il son âme afin de libérer ses petits secrets ? S’il ne recherche pas la connaissance, alors que cherche t-il ? Apprend-il à percevoir les choses ? Construire son univers lui demandera bien des efforts, car la route vers la lumière sera très longue.
Mélanie





Dans son costume de bonne coupe, il attend son train depuis trop longtemps. Il a levé les yeux du journal. Quelle nouvelle a-t-il lue qui l’amène à méditer ? Qui viendra s’asseoir à sa droite, l’obligeant à déplacer la serviette, le chapeau anthracite dont le ruban, rouge comme la cravate, est la seule originalité qu’il se permette ? Nul promeneur ne se reflète dans les vitres du bâtiment moderne, décor mort comme la feuille morte gisant sur une dalle. Le temps s’est arrêté.
Suspendu entre ombre et lumière, entre sol et soleil, il reste là, statufié, dans la lassitude de l’habitude, dans la solitude grise de la ville, de la vie. Allégorie de l’attente.
Daniel




mardi 16 octobre 2012

Célébration de la lecture (II)




Après la lecture de cet ouvrage, nous avons tenté de lui offrir de nouvelles quatrièmes de couverture.

Les voici :
"Laissez-lui son droit de rêve."
La lecture et la peinture, deux arts bien différents mais si proches.
Pour les deux il faut de l'imagination, de la patience et bien d'autres qualités pour rentrer dans cet univers.
Toutes deux se complètent, s'inspirent entre elles.
L'une peut s'inspirer de l'autre et inversement.
Aimez-vous lire ? Aimez-vous les livres ? Aimez-vous la peinture et les peintures ?
Si c'est le cas vous ne serez pas déçus par cet ouvrage.
Il nous montre comment l'auteur s'inspire des tableaux pour écrire.
C'est un vrai plaisir pour les yeux et les oreilles.
Tous les grands peintres s'y retrouvent : Rembrandt, Picasso, Monet et bien d'autres.
Alors, allez-y, plongez dans ce monde de l'art et de la littérature, grâce au regard et aux mots de Colette Nys-Mazure.
Chiara Schifano


"Un fil continu relie la pensée qui conçoit à l'outil qui rédige."
Dans ce magnifique ouvrage, Colette Nys-Mazure décrit une centaine de photos ou peintures représentant des personnages lisant un livre, une lettre, ou bien rédigeant par exemple une missive. Au travers de textes poétiques assez courts, l’auteur exalte la beauté de ces œuvres iconographiques. Les interprétant différemment en se servant de la musique des mots, elle nous permet, à nous lecteurs, de voyager à travers les époques, les pays, les cultures… De Monet à Renoir en passant notamment par Matisse et Delvaux, le livre peut séduire un public d’experts comme un public plus novice. Les amateurs de peintures comme les néophytes y trouveront un plaisir égal. Certains y découvriront même une source d’inspiration pour de futures créations. Dans cet ouvrage Colette Nys-Mazure donne ses propres interprétations des différentes œuvres mais laisse toutefois aux lecteurs la possibilité de faire parler leur imaginaire en allant bien au-delà de ce qu’elle leur transmet. Un livre à découvrir.
Jérémy Delaunois


« Lire, c'est se délier »
Peindre, lire et écrire ne sont pas si différents les uns des autres. En effet, ce sont toutes des actions liées à l'intimité. Ce sont des actes que nous accomplissons seuls avec réflexion et sérénité.
Dans cet ouvrage, les peintures qui sont reproduites mettent en premier plan le(s) lecteur(s) ou l'écrivain. Le peintre nous fait entrer dans la bulle du (des) personnage(s), il interrompt même parfois la lecture ou la méditation. 
En général, quand nous regardons un tableau, nous pouvons imaginer un tas de péripéties pour nous faire une idée de celui-ci. Ici, Colette Nys-Mazure nous raconte ce qu'elle y voit avec poésie et profondeur. La question est : « Et vous, quelle histoire vous traverse l'esprit en l'observant ? »
Si vous n'avez pas l'habitude de lire, nul doute que ce livre vous en donnera l'envie.
Doriana Turco 


"Si la main gauche est dans sa poche, désintéressée, la droite au bout du bras est un cordon ombilical unissant le poète au livre."
S'évader à travers les paysages d'un tableau, rêver l'esprit plongé dans un océan de mots. Une union qui semble impossible aux yeux du plus commun des mortels mais pourtant, un point commun est mis en avant : l'Imagination. L'œuvre de Colette Nys-Mazure offre un mariage extraordinaire dans le monde de l'imaginaire. Elle permet aussi de mieux comprendre le sens et la subtilité que chaque auteur ou artiste désire faire passer à la personne qui s'intéresse à son travail. D'une façon poétique et harmonieuse, tout est décortiqué. De Rembrandt à Picasso en passant par Hopper, Fantin-Latour, Chirico, etc., tous ont un jour représenté, à leur façon, le bonheur de la lecture ou de l'écriture. C'est à partager ce bonheur que nous invite l'ouvrage de Colette Nys-Mazure.
Pryssillia Lavennes


« Ici vient mourir l'écume de la vague lointaine. »
Voici un livre où l'on se rend compte que la peinture et la lecture peuvent être très proches et facilement comparables. Pour bien comprendre une peinture, il faut prendre le temps de l'analyser, de l'inspecter minutieusement et c'est ce qu'a fait Colette Nys-Mazure. Ce livre peut vous aider à mieux analyser une peinture. Cet ouvrage nous montre qu'en analysant une peinture,  on peut trouver une bonne source d’inspiration. Si vous aimez la lecture ou la peinture, ce livre est fait pour vous. Vous y retrouverez les plus grands peintres (Monet, Picasso, Rembrandt, ...) et tous ces tableaux sont accompagnés d'une description agréable à lire.
Nazario Rubino

«Je ne trempe pas ma plume dans un encrier mais dans la vie.»
L'écriture et la peinture, deux arts distincts auxquels Colette Nys-Mazure a trouvé un point commun. En effet, dans chacune des œuvres contenues dans ce livre se trouve l’expression de l'écriture. Que ce soit dans une lettre ou dans un livre, celle-ci apparaît. Toutes sont couplées à des textes de Colette Nys-Mazure parfois poétiques, parfois analytiques ou encore anecdotiques mais toujours imprégnés de l’esprit de l’auteur. A travers ce livre vous découvrirez le point de vue d'une amoureuse de l'art qui s'est laissé envoûter par ces œuvres afin d'en trouver l'essence même et toutes les subtilités. A vous à présent de vous laisser envoûter par ces peintures et d'en faire votre propre interprétation.
Anthony Brohez



« Les yeux sont rêveurs, en allés, tandis que les coins de la bouche s’affaissent. »
Colette Nys-Mazure, grande poète belge, nous emmène à  la découverte de tableaux toujours lié à l’écriture. Avec son imagination débordante, elle nous décrit de manière assez surprenante sa façon de voir ces différents lecteurs mis sur toile. L’écriture a énormément inspiré de grands peintres, Picasso, Vermeer, Manet,… et les voici enfin  décrits comme si nous étions présents au moment où l’inspiration des tableaux leur est venue. 
Un magnifique livre qui vous fera voyager et découvrir de manière différente ces tableaux quelquefois oubliés…
Madison Légat


« Oui, creuser le message, le comprendre, l'apprivoiser sans que rien ne nous sépare. »
Du dessin à la peinture, la lecture est représentée sous toutes ses formes.
Livres, lettres, secrets, paperasses importantes, écrits bibliques ou religieux, tous sont illustrés sous la plume poétique de Colette Nys-Mazure.
Son livre nous plonge avec talent dans un univers à chaque fois unique.
Chaque page est une histoire, une description, une interprétation à laquelle on découvre des chefs-d’œuvre de peintres connus.
La poésie apaise, l'illustration parle, les mots ont un sens.
Plongez-vous dans la galaxie des arts, choisie et vue par la pensée de l'auteur belge Colette Nys-Mazure.
Mélanie Lonobile

« Oui, creuser le message, le comprendre, l'apprivoiser sans que rien ne nous sépare. »
La lecture n'est pas une occupation. Elle n'est pas un loisir, un hobby, un passe-temps, un divertissement, … Elle est tout. Elle rassemble ce que l'être humain possède de plus cher sous toutes ses formes, la capacité de voir, de distinguer des formes et des couleurs qui se reflètent en rêves, en illusions, en réalités, en imagination,… Comment décrire ces sensations ? Colette Nys-Mazure répond à cette question dans cet ouvrage qui répertorie nombre de toiles ayant pour thème la lecture. Des sensations, des impressions, des traits sur des visages, des couleurs, des saisons, des décors,… Tout est présent dans la peinture. Accordons-nous une lecture de ce livre qui en contient plus qu'il n'y paraît, un temps de poésie et de réflexion à savourer au calme.
Benoît Danhiez


La peinture, un moyen de faire passer  des messages  pour le peintre. 
C'est autre chose que d’écrire ; pour peindre, il faut énormément de patience et être concentré le plus possible. De plus, la peinture n’est pas qu’une idée du peintre ; c’est aussi parfois de la narration : on peut raconter par la peinture.
« Lire » une peinture  et savoir lire un message grâce à une peinture, c’est très émouvant.  C’est cela que nous apprend Colette Nys-Mazure. En plus, dans ce livre, il y a les plus grands peintres  et leurs célèbres peintures accompagnées d’un texte descriptif…
Si vous aimez  la littérature et l art,  ce livre d’art va vous fasciner.
Hamza Mokhtari







lundi 15 octobre 2012

Célébration de la lecture (I)

Nous avons lu Célébration de la lecture de Colette Nys-Mazure.
Voici un petit hommage à l'auteure, que nous recevons le lundi 22 octobre.


mardi 25 septembre 2012

Geneviève Damas, un beau prix Rossel !


Nous avons reçu Geneviève DAMAS, prix Rossel 2012 pour Si tu passes la rivière.
Mère de trois jeunes enfants, elle nous a raconté comment elle associe son rôle de mère à sa vie d’écrivain. Nous avons appris à la connaître un peu plus, ainsi que le métier d’auteur.
Elle nous a expliqué comment lui était venue l’envie d’écrire, d’où elle tenait son inspiration, son chemin artistique, comment elle vivait cette passion ; elle nous a décrit également en quoi consiste son métier, et quelle joie elle a ressentie en remportant le prix Rossel.
Geneviève Damas a imposé, en toute simplicité, son univers en signant son premier roman : Si tu passes la rivière
Celui-ci dévoile la vie de François Sorrente,  jeune paysan au destin très tourmenté.
L’histoire commence par un avertissement ou plutôt une interdiction : l’interdiction de passer la rivière. Le père de François ne lui laisse pas le choix. François Sorrente, le héros, est le cadet d’une famille de cinq enfants : l’aînée est Maryse, partie sans explication au-delà de la rivière, puis viennent les trois frères : Jules, Arthur et Jean-Paul qui s’est suicidé pour une raison qui sera révélée plus tard dans le roman. François s’interroge souvent sur le départ de Maryse et l’absence de sa mère. Tout au long du roman, nous, lecteurs, sommes plongés dans la tête de François. François, au début, ne fait que s’occuper des cochons, qu’il considère comme ses amis ; mais au fur et à mesure il devient un homme, apprend à ne plus avoir peur des mots et change sans s’en rendre compte.
La lecture du livre a enthousiasmé et ému une grande majorité de la classe qui le trouve très divertissant, amusant et captivant ; le langage employé est familier mais correctement adapté à la classe sociale de François. Les personnages sont très attachants et complètement différents les uns des autres. Chaque individu a son caractère, sa façon de penser, ses qualités comme ses défauts. La fin ouverte laisse au lecteur la possibilité d’imaginer tout et n’importe quoi. Chacun d’entre nous a d’ailleurs rédigé une « dernière page » qu’il a remise à Geneviève Damas le jour de la rencontre.

Geneviève Damas est arrivée vers 8h20, avec son énergie et son livre plein de post-it qui marquent les extraits qu’elle voulait nous lire. Par manque de  temps, elle n’a pu en lire qu’un, le début de l’histoire. Elle a été très surprise par la mini expo sur le thème du livre que nous avions installée et a apprécié les suites imaginées par chaque élève. Après la lecture, un petit silence s’est installé. Le stress de la première question ? Mais celui-ci ne dura qu’un moment …
Voici l’interview  de la détentrice du prix Rossel :
  • Pourquoi  « fada » qui fait méridional ? Où et quand se passe l’histoire ?
On m’a souvent posé cette question.
En fait, je n’avais pas envie que François utilise seulement le mot « fou » pour se définir. Je trouve que « fada », ça reprend  pleins de significations : fou, original, la tête dans les nuages, toujours dans la lune,… Bien sûr « fada », comme me l’a fait remarquer un ami, fait très méridional et mon histoire, on ne l’imagine pas tellement dans le sud.
En même temps, je me suis dit que je pouvais prendre cette liberté car le lieu n’est pas vraiment défini. Mais cette expression m’aide aussi à montrer au lecteur que François n’est pas dans des mots précis, au début de l’histoire. Maintenant pour le lieu, dans ma tête, l’histoire ne se passe pas dans le nord de la France. La maison des Sorrente se situerait plus dans les environs du Périgord.
C’est mon interprétation, mais je pense tout le temps que le lecteur a toujours raison ! Une fois que le livre a été écrit, chacun en tire sa propre version et si quelqu’un voit mon histoire dans le nord ou en Angleterre, il a raison …
Au point de vue de l’époque, pour moi, le livre se déroule dans les années 50/60, puisqu’on a quand même une camionnette. J’aimais bien cette idée qui me rappelle mes vacances dans la campagne française, dans le Périgord. Là-bas, on a l’impression que tout est resté tel quel, immuable …
Jusqu’au moment où François maîtrise les mots, son monde ne peut se transformer mais après tout s’accélère pour lui ! C’est cela que je voulais faire comprendre au lecteur.
  • Pourquoi cette fin ouverte ?
 C’est l’héritage du théâtre.
Au théâtre, on mise beaucoup plus sur l’implicite que sur l’explicite pour que le personnage puisse vivre dans la tête du spectateur. Dans mon roman, j’ai voulu laisser le personnage dans la tête du lecteur pour qu’il puisse le faire vivre.  Car à la fin de mon livre, ce n’est plus mon personnage mais le personnage du lecteur. Il peut imaginer tout et n’importe quoi ! Certaines personnes penseront que François va mourir noyé, d’autres ne le penseront pas. François Sorrente n’est plus à moi mais à vous. Chacun lui a donné un visage, une vie dans un espace imaginaire,…
Moi, je ne pense pas qu’il meurt mais chacun peut avoir sa propre fin.
La dernière phrase (« C’était froid ») montre que tout n’est pas fini, qu’il reste encore du chemin à faire, que ce ne sera pas forcément facile et qu’il reste encore plein de choses à faire.
  •  Quel rapport entre vos études de droit, votre passion pour le théâtre et ce roman ?
C’est très complexe … Parce que j’avais un avis  sur cette question-là quand j’étais aux études et j’en ai un autre aujourd’hui.
Tout d’abord, j’étais l’aînée de ma famille et moi, personnellement, je trouve que les parents sont plus stricts avec les aînés que les suivants. Parce que l’aîné doit réussir, il doit être bien éduqué, …
Et moi dans ma famille, d’un côté, ils sont tous dans le droit (avocats, magistrats,…). Ma mère voulait faire des études de droit. Elle réussissait. Mais mon grand-père, très vieux jeu, trouvait qu’une femme devait rester au foyer !!!  Elle a dû donc arrêter ses études, ne pas travailler, ce fut le gros chagrin de sa vie.
Et donc, quand j’étais enfant, on ne me disait pas « tu vas faire tes études » mais « tu vas faire ton droit ».
Mon père, comme je suis l’aînée, m’emmenait souvent voir du théâtre, des musées, des films… pour ma culture générale. Mais moi ce qui m’intéressait dans tout ça, dès sept ans, c’était le théâtre, la scène… Je voulais être actrice.  Quand j’ai enfin osé le dire à mes parents, ça a été une catastrophe !!! Ils ne voulaient pas d’une fille actrice car une vie d’acteur ce n’est pas stable, ça ne gagne pas…  Ils n’ont plus voulu que je reste dans les troupes auxquelles j’appartenais. J’ai donc fait mes études de droit !
La première année, j’ai été énormément déprimée.
La deuxième, j’ai  trouvé une pièce de théâtre. C’est le trimestre où j’ai le mieux réussi dans mes études de droit. J’ai décidé, suite à cette expérience, de m’inscrire au conservatoire en déclamation, en parallèle avec mes études de droit.
Pour moi, le droit donne beaucoup de culture générale, aujourd’hui je trouve ces études intéressantes. Quand j’y étais, je maudissais ces études, elles étaient un obstacle à ma passion. J’avais peur de ne jamais pouvoir exercer dans le théâtre.
Après mes études, j’ai été à l’IAD et j’ai continué dans le théâtre.
Aujourd’hui j’ai conscience que le droit m’a donné un bonus, une structure pour le théâtre. Pouvoir parler, demander des subventions, rechercher des organisateurs, signer des contrats font partie de la vie quotidienne d’un acteur.
Autant j’ai maudit mes parents à l’époque, autant aujourd’hui je les remercie.
Pour en arriver au roman, le théâtre m’y a amenée. Avant le théâtre j’aimais lire, mais à partir du moment où j’ai commencé à jouer, ça a été une transformation de ma vision de la littérature. Je trouvais certains textes beaux. Et d’une certaine façon, le texte de théâtre est le cousin de la littérature romanesque. Et évidemment, les études de droit sont des études littéraires. Ce sont toutes ces petites choses qui m’ont amenée à l’écriture de mon roman.
  • Pouvez-vous nous parler de votre carrière au théâtre ?
 Je sors de l’I.A.D., une école assez physique mais avant ça, je faisais des études de droit et payer une deuxième école était impossible donc mes parents m’ont dit : « Si tu veux faire du théâtre, tu devras payer tes études. » J’ai trouvé du travail dans une salle de théâtre, c’était une opportunité pour moi, en journée je suivais mes cours de théâtre et le soir j’allais au spectacle ; à force de regarder 25 fois le même spectacle, eh bien je savais ce que j’aimais et ce que je détestais, ça m’a permis de former mon regard. J’ai rencontré un metteur en scène, qui m’a proposé de faire des assistanats, c’était un super metteur en scène qui arrêtait sa troupe quand je ne comprenais pas une chose pour m’expliquer. De là j’ai travaillé de plus en plus sur des projets en France, au Japon, pour les petits enfants. Ensuite j’ai travaillé sur Molière avec Jacques Delcuvellerie, un assistanat éprouvant. Je faisais beaucoup d’adaptations romanesques en théâtre, c’était un peu ma manière de commencer à écrire, je crois. Parallèlement à ce gros projet de Molière, j’ai adapté un auteur québécois. Il m’avait invitée au Québec mais le projet est tombé à l’eau, car il a reçu une offre plus prometteuse pour lui. J’ai alors écrit un texte qui s appelait « Molly à vélo » et j’ai demandé à un chouette metteur en scène de le mettre en scène. Ça a très bien marché et j’ai continué à écrire et jouer des pièces.
  • Quels livres vous ont particulièrement marquée ?
Je crois fondamentalement, que le livre donne une vie supplémentaire.
Moi je suis une fana de La recherche du temps perdu de Marcel Proust. On avait un prof en rhéto au collège qui nous a donné cours pendant deux mois sur la recherche du temps perdu ; on le trouvait vraiment ringard et on riait pendant son cours ;  à la fin du cours, il a dit : « Riez bien mais il y a quelqu’un dans cette classe qui lira toute la recherche du temps perdu ; c’est toujours comme ça quand je donne ce cours et c’est d’ailleurs pour ça que je le donne. » Et moi à 23 ans, j’ai tout lu !! Et après j’ai recroisé ce professeur et c’est vrai que je lui dois beaucoup. Récemment je devais négocier avec une personne néerlandophone pour organiser des lectures et le mon de ma compagnie est Albertine, c’est le nom de l’héroïne de la recherche du temps perdu. Donc on parle et puis à la fin elle me pose une question : « Pourquoi votre compagnie s’appelle l’Albertine ? » Je lui réponds : « Vous connaissez Marcel Proust ? » Et là elle me répond : « Ah oui !! Je m’en doutais !! » Elle était complément emballée et puis le reste de l’interview nous n’avons parlé que de ça comme si Albertine était une cousine à nous, pour nous ça avait tellement de réalité et je me suis dit : ça existe en fait. L’imaginaire pour autant qu’on lui donne de la valeur est aussi important que le réel, l’imaginaire permet de rester heureux, les livres nous font rêver, ils nous emmènent dans l’imaginaire et on voyage.
  •  Pourquoi ces nombreux remerciements au début du livre ? Quel rôle ont joué ces gens dans l’écriture ?
 Le premier c’est mon mari ; si je ne le cite pas il me fait la peau (rire), le second c’est quelqu’un avec qui j’ai eu une correspondance et qui m’a dit après que j’ai envoyé le texte aux éditeurs qu’il aimerait bien le lire, ensuite il y a une collaboratrice de ma compagnie.
Ce sont toujours des gens qui m’ont soutenue moralement.
Il y a mon premier éditeur de théâtre, il a fait un truc extraordinaire, il a demandé à une stagiaire de faire une fiche de lecture, alors qu’il avait beaucoup de travail à lui faire faire. Donc elle a tout analysé, elle a fait un résumé du bouquin et quand Luce Wilquin a publié, elle m’a demandé un résumé du livre, je lui ai envoyé celui de cette stagiaire.
Puis il y a Michel Lambert, au début j’ai envoyé mon manuscrit à toutes les maisons d’édition en France, mais en fait il m’a expliqué, alors que je n’y connaissais rien, qu’il ne fallait jamais faire ça. Quand vous envoyez un manuscrit dans une maison d’édition, au départ il est lu par ceux qu’on appelle les lecteurs, ensuite ils remettent une note de lecture, si elle est positive, elle passe au comité de lecture et on relit tout.
Mais les lecteurs dans les maisons d’édition françaises sont très mal payés, ce qu’ils font, c’est de se faire engager par plusieurs maisons d’édition, mais si vous envoyez vos manuscrits la même semaine, ils vont prendre votre manuscrit dans chaque maison d’édition où ils travaillent et vont faire une seule fiche de lecture et se feront payer quatre fois pour le même travail.
Donc Michel Lambert m’a dit qu’il fallait que j’envoie un ou deux manuscrits une semaine et d’autres quelques semaines après pour tomber sur d’autres lecteurs qui liront peut-être plus que les précédents. Ensuite j’ai tenté ma chance en Belgique, et je me suis demandé à qui je pourrais envoyer mes manuscrits, et il m’a dit que je pouvais lui envoyer mais que ça ne serait pas lui qui s’en occuperait mais sa collaboratrice, comme ça, l’avis serait neutre, je l’ai aussi envoyé à Luce Wilquin. Un jour en rentrant chez moi il me téléphone, et me dit qu’il le prend, en même temps je regarde mes mails et je vois un message de Luce Wilquin qui me dit qu’elle le prend.
Seulement je m’étais engagée avec Michel Lambert, j’ai donc téléphoné à Luce Wilquin pour lui dire que j’avais dit oui à Michel Lambert, elle m’a demandé si j’avais officiellement signé avec lui, je lui ai répondu que je n’avais pas encore signé. Elle m’a dit « tant que vous n’avez pas signé avec Michel Lambert je garde le manuscrit et il parait en septembre, le jour où vous signez vous me téléphonez et je jette le manuscrit à la poubelle. »  
Le lendemain je sonne à Michel Lambert je lui demande s’il va m’envoyer le contrat et il répond que je l’aurai dans la semaine, un mois après toujours rien. Il me fait traîner six mois.
J’appelle François Emmanuel qui me dit que les éditions pour lesquelles travaille Michel Lambert sont au bord de la faillite, alors j’appelle la promotion des lettres au ministère, et ils me disent qu’il ne faut pas que je signe avec eux. Alors j’ai pris mon téléphone, j’ai téléphoné à Luce Wilquin pour lui dire que je n’avais pas encore reçu de contrat, que je me sentais déliée de ma parole envers Michel Lambert. Elle m’a dit que ça ne changeait rien, que pour elle mon bouquin paraissait toujours en septembre. J’ai donc téléphoné à Michel Lambert pour lui dire que j’avais signé avec Luce Wilquin, il m’a dit qu’il n’osait pas me dire que sa maison était en faillite et que c’était la meilleure chose que je puisse faire.
  •  Qu’avez-vous ressenti lorsque vous avez reçu le prix Rossel ?
 Déjà, chaque année je regardais le prix Rossel et pour moi c’était inaccessible. Et donc mon éditrice, un jour me dit qu’elle a envoyé mon roman au prix Rossel et que je n’ai aucune chance. Un mois avant cette grande cérémonie, je suis invitée à une interview, à un moment le monsieur de l’interview me dit : « On parle de vous pour le prix Rossel… » J’étais abasourdie. Puis on me téléphone et on me dit qu’un membre du jury  voulait que je sache qu’il aimait beaucoup le livre. Je me dis : « S’ils me disent ça, c’est qu’ils n’ont pas l’intention de retenir le livre mais ils voulaient que je sache leurs opinions. » Une semaine avant ce fameux prix, je regarde le journal pour voir les nominés et j’apprends que je suis l’un d’entre eux et ce jour-là j’ai un coup de téléphone d’une journaliste qui me demande si je suis contente, alors là je pense que je n’ai aucune chance car ces personnes nominées, ce sont des auteurs très importants avec de grosses productions et là elle me dit : « Détrompe-toi, tu es la favorite mais tout peut encore basculer. » Et enfin le jour du prix Rossel à douze heures ils m’ont appelée et j’ai enfin su le verdict ; en même temps tout s’arrête car même si on pense que c’est possible extraordinaire, on n’arrive pas à y croire. Des gens tellement remarquables ont eu ce prix !